On pourrait tout aussi bien se demander pourquoi le yoga ? ou pourquoi le naturisme…
Pour moi, yoga et naturisme partagent non seulement des valeurs communes, mais également une vision similaire de l’existence, comme l’union et la libération du corps et de l’esprit, et nous permet de revenir à des valeurs plus authentiques, débarrassés d’une image et d’un statut imposées par la société, la religion, la famille, l’époque…
Le mot yoga vient d’une racine verbale sanskrite qui signifie « unir, atteler ». Le yoga est une action, visant l’unification, une union qui permet à chacun de se connaître en profondeur, de faire UN avec sa vraie nature, en intégrant les aspects physiques/énergétiques, psychiques/émotionnels et spirituels.
A travers la pratique des asanas, son aspect physique le plus évident, le yoga aide le corps à rester en bonne santé, mais surtout à équilibrer et relier tous les aspects de son être. A travers les autres pratiques (la méditation, la récitation de mantras, le pranayama …), le yoga permet l’accès à une meilleure connaissance et compréhension de structure énergétique, une meilleure maitrise de ses énergies internes, de ses émotions…
Dans cette exploration de notre pleine dimension intérieure, le yoga nous aide sur le chemin de notre évolution personnelle, vers une vie pleine et harmonieuse.
Plus légèrement mais non pas sans sérieux, le yoga n’est pas pour moi une ascèse drastique, même si discipline personnelle et engagement sont deux maitre-mots, mais reste un plaisir extrême, celui de se sentir bien dans son corps et dans sa tête, ouvert et heureux de l’être, en harmonie non seulement avec soi-même, mais surtout capable de connecter avec autrui. C’est aussi un jeu intense, entre lois gravitationnelles et force de l’esprit, patience et stratégie, discernements et connaissances, et un désir toujours plus grand de se dépasser et d’aller de l’avant… Car le plus incroyable est que la satisfaction d’avoir « réussi » ou « atteint » un objectif fixé mène à un plaisir encore plus grand, celui de découvrir que le chemin ne s’arrête pas là, mais qu’au contraire, il nous entraine toujours plus loin. Alors, restons curieux, et ouvert à la nouveauté !
Bien, voilà donc pour le yoga. Mais pourquoi la nudité ?
Allier yoga et naturisme participe au sentiment de liberté totale du corps et de l’esprit, sans entrave. Bien souvent, les vêtements que l’on porte représentent ce que l’époque, le pays, la société, notre famille nous a imposé : un statut, une position, une image… qui peut tout à fait être l’expression de notre personnalité ou, au contraire, être tout simplement un masque posé sur notre véritable soi/identité.
Dans le naturisme, mouvement né au 19ème siècle qui se nourrit des idées du siècle des lumières, il s’agit de dépasser la simple nudité. Si elle y reste primordiale, elle est loin d’en être le seul caractère. En effet, être naturiste, ce n’est pas seulement vivre nu. Le maitre-mot est respect. Le XIVe Congrès international INF-FNI (Agde, 1974) a définit le naturisme comme étant « une manière de vivre en harmonie avec la nature, caractérisée par la pratique de la nudité en commun, ayant pour but de favoriser le respect de soi-même, le respect des autres et le respect de l’environnement ».
Pour moi, ces deux mots, harmonie et respect, sont particulièrement importants et significatifs. Harmonie et respect passent par une sensibilité, une écoute, un éveil et un regard sur le monde intérieur et extérieur, et donne sa dimension sociale au mouvement. Le respect et la protection d’autrui, la convivialité, l’égalité, la tolérance et l’acceptance y sont de fait des valeurs primordiales. Le naturisme permet ainsi aux personnes en souffrance de retrouver confiance, de s’accepter plus facilement, de s’affirmer, et de moins craindre le regard d’autrui.
Encore aujourd’hui, et peut-être même encore plus aujourd’hui, dans nos sociétés dites modernes et civilisées, un discours rétrograde, depuis (trop) longtemps véhiculé par les obscurantismes religieux, affirme que le corps est mauvais, la nudité honteuse et le nu forcement pervers. Mais au même instant, hypocritement, la mode joue sur le décolleté, les pantalons taille basse, les bikinis de plus en plus mini, les vêtements échancrés, bref, s’amuse à montrer-sans-montrer, ce qui finalement excite plus que la nudité la plus naturelle. Le vêtement qui cache telle partie et expose telle autre est beaucoup plus érotique que la nudité intégrale. Ce qui est caché suscite d’autant plus la curiosité, et ajoute une frustration et une envie que le nu réfute.
La nudité des naturistes est une nudité émancipatrice et saine, dans le sens où elle combat tous les discours de culpabilisations des hommes et des femmes au travers de leur corps. La pratique naturiste est une réhabilitation du corps, de tous les corps. Etre nu en collectivité, c’est accepter avant tout son propre corps, et représente un antidote aux complexes, à la honte et à la dictature de la beauté imposée par la société consumériste et ses « valeurs ». Accepter son propre corps, sa propre image, c’est revenir à son essence, son véritable soi, le fameux « true self » de nos amis anglophones. Ainsi, vivre « au naturel », embrasser ses idéaux, c’est revenir à des valeurs plus authentiques, et se libérer des valeurs imposées par un dictat social, ne plus être assujetti à des normes restrictives, pour rejeter les inégalités, et prôner l’épanouissement de chaque individu, au sein d’une communauté, communauté qui représente pour moi une communauté d’idées, une communauté de valeurs, une communauté d’émotions.
Un retour aux sources…
Et si vous avez encore le courage de poursuivre votre lecture, et faire un saut dans le temps, je vous dirais que pratiquer le yoga nu, c’est aussi revenir aux sources ! En voici la preuve : le terme “gymnosophie”, associé au yoga par Socrate ou Platon, est également utilisé pour qualifier le naturisme. Intrigué ? Alors poursuivons…
Remontons le temps et rapprochons-nous de nos origines. De tout temps, l’Occident n’a jamais ignoré l’Orient et, bien au contraire, en a toujours profité. Notre philosophie, nos valeurs, nos cultures, nos modes de pensées, notre médecine (!), ne sont pas nés ex-nihilo ! N’oublions pas que ce sont les Aryens, un peuple d’Asie Centrale, parlant la langue Indo-européenne, qui ont peuplé à la fois la Grèce, l’Iran et le nord de l’Inde. Quant à nos bons vieux ancêtres les Gaulois, ils ne sont pas en reste : en effet, la religion des Druides est apparentée à celle de l’Inde, montrant des dieux Gaulois à trois têtes, comme Brahma, et souvent en posture assise de Yoga, jambes repliées.
Pour en revenir à la Grèce et à l’histoire antique de l’Europe actuelle, les contacts avec l’Inde et ses fameux yogis nus sont nombreux. Socrate, par exemple, aurait étudié la philosophie avec un sage indien, selon Aristomène. En moins 326, lorsque Alexandre le Grand envahira l’Inde, il tombera, à Taxila, sur une horde d’ascètes jaïns nus, que les auteurs grecs appelleront « Gymnosophes », mot grec qui signifie : philosophes ou sages nus. Il ramènera même en Perse un ascète jaïn, Calanos, comme Arrien le décrit en détail.
Outre les aspects économiques connus entre Orient et Occident à cette époque – comme en témoigne la statue hindoue retrouvée à Pompéi et les centaines de monnaies romaines retrouvées à Virampatnam près de Pondichéry -, des vestiges historiques nous montrent que tout le bassin méditerranéen a été très influencé par les idées du Jaïnisme. L’empereur Chandragupta, en moins 313, a envoyé des ambassades de Bouddhistes dans différents pays de l’Empire romain. L’empereur Açoka en fait de même en moins 230, et un groupe de Bouddhistes a même vécu à Alexandrie pendant plusieurs siècles. Le texte des discussions du roi grec Ménandre (Milinda) avec des sages bouddhistes a été conservé et publié. Un groupe mystique d’Israël, celui des Esséniens, très influencé par ces gymnosophes qui prêchaient le message d’Ahimsā, la Vérité Centrale du Jaïnisme, au peuple d’Alexandrie en Egypte, étaient des ascètes qui suivaient ces principes de non-violence. Ils avaient une grande emprise sur le peuple et une grande influence en Palestine. Jean-Baptiste était un maître ascète de cette école. Un certain Jésus-Christ a d’ailleurs été très influencé par ce groupe non-violent.